Nous avons retrouvé le communiqué annonçant la création de la TACAE, toujours pertinent après 35 ans de lutte :
Sherbrooke, le 19 juin 1990.
Afin de réagir à l’appauvrissement grandissant qui se fait sentir en Estrie, une quinzaine d’organismes de Sherbrooke ont créé un nouveau lieu de concertation : LA TABLE D’ACTION CONTRE LA PAUVRETÉ.
Ce nouveau regroupement réunit des organismes qui travaillent à l’amélioration des conditions de vie des personnes à faible revenu et offrent des services d’aide directe à la population. Ces organismes sont :
Cette nouvelle coalition bénéficie également de l’appui des CLSC SOC et Gaston Lessard. De plus, d’autres organismes qui travaillent dans le même sens pourront éventuellement se joindre à ce regroupement.
La création de la TABLE D’ACTION CONTRE LA PAUVRETÉ est une réaction à la hausse importante de demandes de dépannages alimentaires et financiers reçues par ces organismes au cours de la dernière année. Le contexte économique qui prévaut au Québec fait en sorte qu’un nombre croissant de personnes n’arrivent plus à assurer leurs besoins essentiels tels la nourriture, le logement et les vêtements. Cette situation les amène à solliciter davantage nos organismes pour des dons en alimentation et en argent.
À nos yeux, il s’agit là d’un symptôme flagrant de l’appauvrissement d’une couche de plus en plus large de la population, qui s’accentue avec la complicité de nos gouvernements. Les choix économiques faits par l’État et son retrait vis-à-vis de ses responsabilités sociales sont des causes directes des inégalités économiques qui caractérisent le Québec actuellement. Nos organismes, qui sont au départ sous-financés, se voient donc obligés de jouer un rôle de suppléance en fournissant une aide et des services qui ne sont plus offerts par l’État.
La TABLE D’ACTION CONTRE LA PAUVRETÉ veut s’opposer fermement au retrait de l’État et lutter contre les mesures qui ont pour effet d’appauvrir la population.
Ce nouveau regroupement démontre clairement la volonté des organismes de se solidariser et de concerter leurs actions dans leur lutte pour améliorer le sort des moins nantis.
La TABLE D’ACTION entend mettre en marche très bientôt une série d’actions d’informations et de moyens de pression pour mettre un frein à la situation d’appauvrissement dont sont victimes des milliers de femmes, d’hommes et d’enfants en Estrie.
Il est facile de lire ces lignes et d’avoir l’impression qu’elles ont été rédigées de nos jours. Les politiques néo-libérales continuent de faire des ravages. Quand le gouvernement «donne» d’une main, c’est pour que l’autre main pousse une autre partie de la population dans la précarité, dans une tactique classique de diviser pour mieux régner; les bons pauvres contre les mauvais pauvres.
Pour imager cela, il suffit de regarder les familles qui ont bénéficié de l’ajout de plusieurs programmes d’aide des paliers provincial et fédéral. Aujourd’hui, elles sont moins présentes dans les statistiques de pauvreté qu’il y a 20-30 ans. Pendant ce temps les personnes seules ont été ignorées par les gouvernements. Résultat : c’est presque 20% de cette population qui est en situation de pauvreté (le taux dans la population générale étant de 10%).
Pour pallier à ce manque d’intervention de l’État, c’est encore les organismes communautaires, sous-financés, qui doivent abandonner une partie de leur mission de transformation sociale pour empêcher toutes ces personnes de se retrouver dans une situation encore plus dramatique.
Avec le climat politique actuel, la montée de la droite et de l’individualisme, les risques pour les chaines d’approvisionnement, les guerres et l’augmentation des inégalités économiques, il est évident que les prochaines années s’annoncent difficiles pour la population en général, plus particulièrement pour les classes populaires.
Si l’on peut avoir un souhait, c’est que de cette période se construisent des liens et des consciences de solidarité. L’être humain a réussi à devenir ce qu’il est aujourd’hui grâce à ses capacités de collaboration et de compassion et il est primordial d’y revenir.
L’union fait la force!